_________________________________________________________________________
Un bûcheron a, tout près d’ici, sacrifié un géant branchu, abandonnant au cycle du temps, écorce, souche et feuillage épars.
Alma Delbosco, mezzo aux chuchotantes tonalités du vent dans les feuilles, aux tonitruantes sonorités de la cascade en montagne, hôte de ce labyrinthe végétal, forte comme un chêne sait de tout temps faire chant de tout bois.
Elle s’imprègne des humeurs et des senteurs de la forêt. Son visage soyeux sculpté à la scie à chaine est couronné d’un fronteau ligneux à l’artère-mère gorgée de sève, blason de sa foi sylvestre rappelant la texture de sa tunique aux couleurs et aux odeurs de l’automne.
Sa voix, puisant au plus profond, au delà même de ses racines, résonne. Les notes scarifiées sur la pelure des bouleaux jaunes font frissonner pierres, arbres et bêtes des alentours. Tout se tait, entend cette voix éternelle, venue de si loin jusqu’ici… le souffle et la respiration de l’univers.
FRF 17 mai 2020
_________________________________________________________________________
Petite histoire de textes
En ce matin du 17 mai, j’ai envoyé à mon amie Adriana la photo augmentée, intitulée Cantatrice. Je ne lui ai envoyé aucun texte, seulement deux mots, le nom de la photo. J’aime beaucoup recevoir de sa part des commentaires tout à fait spontanés sur mes photos. Il y a tellement d’années que nous travaillons ensemble, elle, les textes et moi, les photos, que j’apprécie son regard libre sur mon travail.
En après-midi, le 17, elle m’envoie un courriel me disant que la photo l’a inspirée à penser et à écrire un texte en français. On se parle et elle me lit ce que voici.
OPÉRA ENSORCELÉ, ENSORCELANT ?
En robe de velours brodée de soie…
Rayonnée par les fastes de la scène…
Une scène princière aux mille éclats…
En clé de sol ou en clé de fa…
Couronnée par le don de la voix…
Une voix née au cœur que voilà…
Solfie, cantatrice, offre ton rituel !
Charme, cantatrice, incarne l’idole !
Mue, cantatrice, mue les paroles …
en un univers d’amour intemporel!
Chante, cantatrice, chante !
Adriana Ramponi, le 17 mai 2020, Buenos Aires
_________________________________________________________________________
Ensuite, je lui ai envoyé le texte que j’avais terminé le matin même, le texte qui se trouve sous la photo.
Elle, a incarné la cantatrice sur scène, dans le merveilleux théâtre Colon de Buenos Aires. Elle la voit en diva, en idole, en personnage de charme, se produisant pour un public connaisseur.
Pour ma part, j’incarne le personnage dans la forêt boréale comme appartenant à ce milieu, tout en étant le milieu lui-même en entier, à la fois partie et tout. Ce qui est essentiel au sud hyper-rafiné de l’Argentine comme au nord forestier de notre réalité, c’est que grâce à ces deux visions, s’entrecroisent dans un même chant, une voix éternelle et un univers d’amour intemporel ; deux visions, un aboutissement identique.
_________________________________________________________________________